Parmi les produits de la mer les plus prisés par les polynésiens, nous retrouvons la grande famille des crustacés. Que ce soit le ‘ōura miti (langouste), le varo (squille), le ‘ūpa’i (crabe vert), ou encore le ti’ane’e (cigale de mer), ces produits sont synonymes de fête et leur pêche est aujourd’hui règlementée afin d’assurer une exploitation pérenne. Depuis les années 1980, la crevette bleue d’aquaculture (Litopenaeus stylirostris, espèce importée et désormais domestiquée depuis 30 ans) a fait sa place sur le marché local pour atteindre en 2022 une consommation annuelle d’environ 165 tonnes. De par ses propriétés physiologiques et malgré les risques d’échappés inhérents à l’élevage, l’espèce ne s’est pas implantée dans le milieu naturel et son exploitation est donc possible exclusivement via l’aquaculture.
La Polynésie française étant une des dernières régions du monde exempte de toutes maladies à déclaration obligatoire selon l’Organisation internationale des Epizooties, l’importation de crustacés est strictement réglementée (Arrêté CM du 01/09/2017) et permet le développement d’une crevetticulture polynésienne saine, sans utilisation de produits médicamenteux et sans conservateurs.
Afin de répondre à la demande du marché en crevettes fraîches estimée à 400-500 tonnes par an, la Direction des ressources marines (DRM) et ses partenaires scientifiques puis privés, ont développé une technique de production de crevette bleue en cage lagonaire ; technique permettant de s’affranchir des grandes implantations foncières des productions de crevettes bleues réalisées traditionnellement à terre.
Après 10 ans d’expérimentation, les premières fermes crevetticoles en cages lagonaire voient le jour au début des années 2010. Ces techniques de production en lagon étant uniques au monde, 11 porteurs de projet présentant des dossiers technico-économiques solides ont pu être formés par la DRM depuis 2012 (5 projets sur les îles Sous-le-Vent, 5 sur les îles du Vent et 1 sur les Tuamotu).
Ces formations théoriques et pratiques de 3 mois dispensées par la DRM sur son site de Vairao, permettent aux porteurs de projet d’acquérir les bases aquacoles essentielles à la bonne gestion des productions et de finaliser leur dossier technico-économique nécessaire à la demande d’agrément aquacole et de concession maritime. L’agrément aquacole permet à l’aquaculteur de s’approvisionner en post-larves à l’écloserie Vaia et d’avoir accès aux aides à l’investissement du Pays. Cette formation est également dispensée pour porteurs de projets sur des élevages en cages de poissons lagonaires.
Depuis la fin du mois d’Août, 2 porteurs de projets (originaires de Maupiti et Hitia’a), dont les candidatures ont fait l’objet d’une sélection et validation au préalable, suivent cette formation sur le pôle aquacole de Vairao. Au travers de celle-ci, les porteurs de projet effectuent les étapes clés de l’élevage comme le transport des post-larves, la phase de pré-grossissement et de grossissement, les échantillonnages et le tri des lots élevés, le nourrissage ou encore l’abattage pour la commercialisation. Outre ces aspects techniques, la physiologie de l’animal, la réglementation locale en matière d’aquaculture ainsi que le montage d’un business plan sont également passés en revue avec les stagiaires.
A la fin de cette formation, les futurs aquaculteurs devront utiliser le savoir-faire et les compétences acquises sur leurs sites de production. Ceci se fait régulièrement dans le cadre d’une convention d’assistance technique avec la DRM pour des projets pilotes. La finalité étant que ces projets se concrétisent, soient créateurs d’emplois et de richesses et contribuent ainsi au développement d’une aquaculture polynésienne durable.