Monsieur le Président de l’Assemblée de la Polynésie française ;

Mesdames et messieurs les Ministres ;

Mesdames et messieurs les présidents d’organisations et d’ordres professionnels ;

Messieurs les représentants des organisations syndicales de salariés ;

Mesdames et messieurs les chefs d’entreprise ;

Mesdames et messieurs les directeurs ;

Mesdames et messieurs ;

 

Ia ora na,

Je vous remercie d’être venus, en nombre, aujourd’hui pour cette journée consacrée à la présentation de nos travaux en matière de fiscalité.

Je dis « présentation », mais pour être plus précis je devrai dire « restitution » car je sais qu’un grand nombre d’entre vous ont travaillé de concert avec les équipes de notre Ministre de l’économie et des finances, pour aboutir à des propositions concrètes.

Vous savez, parler de fiscalité n’est jamais simple pour tout décideur public car il s’agit de sujets sensibles et impactant pour les entreprises mais aussi les ménages. J’en suis bien conscient car dès que le sujet de la fiscalité est évoqué, vous avez la certitude que le débat public s’anime, voire d’échauffe.

L’idée qui préside à notre rencontre de ce jour est bien celle de l’échange et de la concertation préalable entre l’ensemble des acteurs de la vie économique car, pour réussir, toute réforme a besoin

  • D’être utile, c’est évident,
  • D’être comprise, c’est nécessaire,
  • D’être partagée, c’est essentiel.

J’en viens à notre sujet du jour.

 

Comme vous le savez, le statut d’autonomie de la Polynésie française lui confère depuis très longtemps la compétence fiscale, prérogative d’ordinaire régalienne car liée à des notions fondamentales telles que la souveraineté et le consentement à l’impôt. Ici, c’est l’Assemblée de la Polynésie française qui détermine, en lieu et place de l’Etat, l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures.

 

C’est cette autonomie fiscale qui nous a permis, peu à peu, de construire notre propre modèle qui, s’il s’inspire de certains mécanismes métropolitains comme la TVA ou l’impôt sur les sociétés, a su prendre ses marques et se différencier pour tenir compte à la fois du contexte économique local mais aussi de la nature des agents économiques qui produisent de la richesse et génèrent des revenus dans ce pays.

Ce système fiscal a contribué et a accompagné efficacement le développement de notre territoire depuis plus de 60 ans et il faut s’en féliciter.

Pour autant, rien n’est définitif, notre environnement est en révolution permanente, la société polynésienne se modernise à grands pas, les pratiques commerciales évoluent et les technologies modernes nous envahissent.

Nous devons donc comprendre ce mouvement, l’utiliser pour mieux servir nos concitoyens en rendant le cadre réglementaires qui régit notre vie communautaire en capacité de répondre aux défis de demain.

Les textes de référence de la fiscalité polynésienne, à savoir les codes des impôts et des douanes, ainsi que la convention fiscale entre l’Etat et le Pays, trouvent leur origine dans la période de fort développement économique lié à l’implantation du centre d’expérimentation du Pacifique (CEP).

Ce bouleversement économique sans précédent, marqué par l’afflux de capitaux extérieurs, a transformé en profondeur le modèle économique de la Polynésie, passant d’une « économie de comptoir » à une « économie de garnison », puis à une « économie de transferts », pour devenir, c’est ma volonté, une « économie endogène, durable, inclusive, solidaire, créatrice de valeur pour tous »

Il nous faut donc aujourd’hui moderniser, ajuster, voir réinventer notre fiscalité pour qu’elle soit plus efficace, plus juste, plus moderne, afin qu’elle puisse répondre aux ambitions que nous formulons.  Il faut enfin que la fiscalité soit un outil qui se mette au service des politiques publiques prioritaires que le gouvernement définit et promeut.

Je sais que certains chefs d’entreprises, se plaignent d’une pression fiscale qui ne cesse de croître alors que la quantité et la qualité des services publics sont jugés insuffisants, du moins perfectibles. En d’autres termes, le principe de « l’impôt-échange » n’apparaît plus pertinent tandis que celui de « l’impôt-redistribution » peine à démontrer son efficience.

De même, vous nous reprochez de ne pas avoir initié une approche plus globale de la fiscalité qui prenne en compte les taux de prélèvement obligatoires des composantes fiscales et sociales.

Sur ce point, je vous ai entendu et le ministre des Finances vous fera dans la journée des propositions qui vont dans ce sens afin de suivre, pour les entreprises et pour les salariés, ce taux de prélèvement obligatoire.

Les économistes, de leur côté, analysent globalement notre système fiscal comme peu incitatif et facilitant davantage la rente que l’entreprenariat et le développement.

Il y a là matière à réflexion et à débat car une société dynamique doit faciliter la réussite de ceux qui osent, de ceux qui investissent, de ceux qui tentent, de ceux qui rêvent !

Et pour permettre d’oser, il faut que les règles du jeu soient claires, simples et non équivoques. Là aussi, nous allons innover, nous allons simplifier.

Aujourd’hui, le dispositif fiscal polynésien s’apparente à un empilement de mesures (autrement dit : un mille feuilles) dont l’objectif a été de répondre bien souvent à des besoins conjoncturels sans nécessairement rechercher la cohérence d’ensemble.

Et je ne parle pas des mesures d’exonérations. Savez-vous, par exemple, que le budget 2021 prévoit plus de 12 milliards de XPF d’exonération de droits de douanes, alors que les recettes douanières sont évaluées à 50 milliards de XPF. C’est cette réalité que nous avons voulu objectiver pour mieux la comprendre et, demain, la faire évoluer.

La structure de notre politique fiscale doit donc évoluer pour répondre à l’exigence de clarté, à l’aspiration à plus de simplicité et à l’impératif de rendement.

C’est pour ces raisons que la puissance publique doit être en mesure de justifier ses choix d’impôts, taxes et cotisations. En transparence, elle doit justifier la pertinence des assiettes, des taux, des planchers et plafonds ainsi que le coût d’intervention, le tout dans une approche globale et dynamique, en cohérence avec les orientations majeures de développement fixées par le gouvernement.

Cette évolution, elle doit se faire avec le concours de toutes les forces vives du territoire. Les dirigeants publics et privés, les experts, les acteurs économiques, les salariés, les consommateurs et les citoyens, tous doivent être associés à ce chantier d’envergure et d’importance majeure pour l’avenir du Fenua. C’est d’ailleurs pour ça que vous êtes tous là aujourd’hui et je m’en réjouis.

C’est le sens des travaux réalisés au cours des derniers mois par notre ministre de l’Economie, et je vous remercie d’y avoir grandement contribué.

Certes, nous ne tombons pas d’accord sur tout, et c’est normal, tant les intérêts particuliers peuvent, parfois, s’éloigner de l’intérêt général. Mais, sur l’essentiel, nous nous retrouvons.

Autrement dit, ce qui nous rapproche est plus important que ce qui nous divise.

En cette période d’incertitudes et de tensions, il est essentiel de nous rassembler autour de valeurs communes et d’objectifs partagés. Et ces objectifs, ils sont simples :

  • Il faut renforcer la solidarité, et cela passe par un soutien à nos comptes sociaux, à notre Caisse de prévoyance sociale qui constitue, je vous le rappelle, le capital de ceux qui n’en n’ont pas
  • Il faut moderniser notre fiscalité pour faciliter la création d’emplois et la croissance de nos entreprises
  • Il faut simplifier nos procédures pour que notre système soit lisible pour les contribuables, particuliers comme professionnels.

 

Des objectifs simples et partagés !

 

C’est sur cette base que nous pouvons construire un pacte fiscal, un accord pluriannuel, une entente entre les pouvoirs publics et les acteurs économiques.

Voilà l’ambition qui est la nôtre !

Voilà le défi que je vous propose de relever !

Voilà l’esprit qui doit animer cette démarche !

A l’issue de cette journée, ce soir, après avoir entendu les conclusions de l’audit puis nos propositions, vous deviendrez les acteurs de ce chantier de simplification et de performance de notre système fiscal !

 

Je vous remercie de votre attention et je vous souhaite une journée riche d’échanges et de partage.