Monsieur le Haut-commissaire de la République en Polynésie française,

Madame la Vice-présidente de la Polynésie française,

Madame et Messieurs les Députés,

Madame et Monsieur le sénateur,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Monsieur le Président de l’Assemblée de Polynésie française,

Mesdames, Messieurs les Représentants de l’Assemblée de Polynésie française,

Monsieur le Maire de la commune de Punaauia, vos adjoints et membres du votre conseil municipal,

Mesdames, Messieurs les Maires et conseillers municipaux,

Monsieur le Président de la Chambre d’agriculture et de la pêche lagonaire,

Mesdames et messieurs les chefs de service et collaborateurs de l’administration du Pays, des communes et de l’Etat,

Madame la présidente de la fédération horticole HEI TINI RAU,

Mesdames, messieurs les exposants, représentants du secteur primaire, agriculteurs, éleveurs, artisans, pêcheurs, aquaculteurs,

Mesdames, Messieurs,

 

Ia Ora Na, Ia Ora Na ia Outou Paatoa.

C’est avec beaucoup d’honneur et d’engagement que je suis à vos côtés aujourd’hui, pour inaugurer notre foire agricole 2023 qui est l’évènement le plus emblématique de la rencontre entre les professionnels du secteur primaire et la population.

Je ne suis pas agriculteur, vous le savez, mais ma vie professionnelle de chercheur à l’université de Polynésie m’a conduit depuis une 30ène d’années à étudier nos coraux, nos poissons lagonaires et nos plantes locales pour en découvrir toutes les richesses et usages qu’ils peuvent apporter.

Et je vais vous confier un secret, lorsque j’avais 16 ans (1986), je suis allé au SDR à Pirae, et je crois que c’était encore le Service de l’économie rurale, pour me renseigner sur les perspectives de recrutement si je partais faire des études d’ingénieur agricole en métropole, et j’y suis retourné l’année suivante, en 87, année de mon baccalauréat. La réponse a été la même, les deux années, « Nous ne pouvons pas te renseigner sur une possibilité de recrutement ».

Aussi, lorsque le Président Moetai Brotherson a souhaité me confier le ministère du secteur primaire, de l’alimentation et de la recherche, j’ai pris l’engagement de pouvoir servir au mieux les intérêts de mon pays et de vous accompagner, vous les acteurs du développement agricole et de la pêche, à construire notre souveraineté alimentaire indispensable à l’essor de tout Pays.

Les quatre mois qui viennent de s’écouler m’ont permis d’analyser l’organisation structurelle de notre agriculture et de la pêche. Longtemps délaissés par les arbitrages budgétaires, notre secteur primaire est aujourd’hui repositionné comme une priorité affirmée du gouvernement.

La raison d’être de mon ministère est de sécuriser notre alimentation pour permettre la souveraineté de notre Pays.

Près de 17 milliards de fonds publics seront inscrits au budget 2024, pour poursuivre la construction d’infrastructures de base essentielles à notre souveraineté alimentaire :

  • L’aménagements de lotissements agricoles et des réseaux hydrauliques y attenant ;
  • Les hangars de stockage réfrigérés sur les quais ;
  • Des ateliers d’agro-transformation dans les îles;
  • Le développement de l’aquaculture avec la zone biomarine et le futur hub aquacole de Hao ;
  • La livraison de 2 abattoirs d’élevage, un aux îles sous le vent et le second aux Marquises ;
  • La création d’une nouvelle écloserie de productions de crevettes et autres poissons lagonaires pour soutenir l’émergence d’une aquaculture familiale ;
  • Un marché de gros dédié à l’approvisionnement des cantines scolaires et une banque alimentaire pour les plus démunis.

Ces infrastructures sont essentielles pour consolider la chaine de valeurs de notre système alimentaire de demain :

De la production à la consommation, de la ferme à l’assiette,

No te fa’a’apu i roto i te mereti, …

Pour atteindre notre souveraineté alimentaire, nous avons besoin de libérer du foncier dédié à l’agriculture, à l’élevage et à l’aquaculture. De très nombreux polynésiens souhaitent faire de l’agriculture leur métier, mais les terres domaniales aménageables, notamment sur les îles du vent, se font rares et ne pourront pas répondre à l’ensemble des demandes formulées.

Aussi, si nous n’arrivons pas ensemble à débloquer le foncier privé pour nos besoins de productions alimentaires, nous n’arriverons jamais à construire notre pilier sociétal qui doit être : « une terre – un toit – un travail ».

En ce sens, je proposerai prochainement une loi du Pays qui permettra aux familles de réaliser des pistes d’accès agricole sur leurs terres qui sont aujourd’hui enclavées et en friche. Le Pays financera les travaux dans le cadre d’un engagement réciproque à valoriser ces terres pour les besoins agricoles et d’élevage.

 

Ce sera l’un des outils pour aider notre secteur, mais chaque polynésien doit aussi prendre conscience que vendre ses terres nourricières par appât du gain financier ne dure qu’un temps !

Lorsque le béton et l’urbanisation galopante auront conquis les champs, nos enfants seront condamnés à se nourrir des importations dont les coûts ne cesseront d’augmenter.

Ainsi, pour atteindre notre souveraineté alimentaire, nous avons besoin d’une main d’œuvre formée, qui soit capable de gérer une exploitation, de récolter, de transformer et de commercialiser ses produits.

Nous allons aider nos jeunes et notre population active à bénéficier de formations et d’accompagnements aux métiers du secteur primaire.

Nous voulons convaincre notre jeunesse de choisir les voies de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche et de l’aquaculture. Ce sont des filières d’avenir stratégiques, car la population a et aura toujours besoin de s’alimenter.

C’est pourquoi, de nouvelles filières seront impulsées par le gouvernement, pour créer de l’emploi et de nouveaux métiers dans le secteur de l’agro-transformation et de la valorisation, dans la petite industrialisation et l’innovation technologique.

Beaucoup de nos jeunes, même avec une formation initiale diplômante, sont trop souvent désarmés face à la dureté de ces métiers ruraux. L’absence de foncier, le manque de moyens financiers au départ, la nécessité d’outils mécanisés…. Sont souvent les véritables causes des échecs.

Je souhaite que nous puissions les accompagner en priorité pour lever ces défis et assurer notre relève.

Nous comptons sur nos nouvelles générations pour bâtir l’agriculture et l’aquaculture du futur et pour créer de l’emploi.

C’est la raison pour laquelle, je propose à Monsieur le Président de la Chambre de l’agriculture et de la pêche lagonaire de travailler ensemble à la reconnaissance de nos métiers du secteur primaire par la rédaction du statut de l’agriculteur et du salarié agricole.

Tavana MOUTAME, je sais que je peux compter sur toi.

Et, je souhaite que nous puissions présenter ensemble un nouveau modèle vertueux pour nos professionnels, afin que nos métiers soient mieux reconnus et mieux protégés. Il s’agit là d’un engagement fort de ma feuille de route.

Les chefs d’exploitation sont souvent accompagnés par une main d’œuvre familiale aujourd’hui non reconnue. Ils ont parfois besoin de faire appel à une main d’œuvre saisonnière, qu’il est difficile de trouver.

Notre secteur primaire est malheureusement vieillissant, comme dans beaucoup d’autres régions du monde, et peu d’entre eux toucheront une retraite.

Je constate également des situations de détresse qui ne sont plus acceptables. Nos grands-parents ou parents agriculteurs ou pêcheurs ont travaillé toute leur vie pour nourrir leur famille et la population, et ils n’ont pas eu de retraites et parfois ont fini leur vie sans aucun soutien.

Nous devons, pour cela, revoir nos mécanismes sociaux afin de veiller à ce que tout un chacun puisse contribuer au financement de sa retraite et de sa couverture maladie.

Nous devons donc ensemble trouver les moyens d’intégrer plus de jeunes de manière durable au sein de vos exploitations et vous aider à les accueillir.

Ces futurs salariés doivent pouvoir avoir des perspectives professionnelles stables, une couverture sociale et une retraite. Ce sont nos enfants, et ils sont notre avenir !

Le budget du pays doit répondre à énormément d’urgences : la santé, le social, les logements OPH, les associations de jeunesse, les transports en communs, l’éducation, les aides à l’emploi, la question du handicap et la cherté de la vie….

Notre secteur primaire doit donc aussi se prendre en main de façon solidaire et trouver ses propres sources de financements pour grandir et se consolider.

Sans financements nouveaux, nous ne pourrons pas développer les infrastructures nécessaires telles que :

  • la recherche/développement pour notre propre production de graines tropicalisées ou répondre aux besoins de la filière biologique,
  • des centres naisseurs porcins, pour les poussins de chair ou pour les poules pondeuses,
  • la mise en place d’usines de fabrication de fertilisation organique à base de nos effluents d’élevage et de végétaux d’origine terrestre ou marine,
  • la culture de nos matières premières servant à l’alimentation du bétail,
  • l’installation d’écloserie aquacole de nos poissons lagonaires,
  • la formation de greffeurs de perles locaux,
  • ou même la mise en place d’un véritable fond assurantiel d’indemnisation des catastrophes naturelles ou zoosanitaires impactant nos cultures ou nos élevages….

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De la performance de notre secteur primaire dépendra notre capacité à faire un véritable virage alimentaire. Choisir le « manger local » n’est pas anecdotique, il doit être un choix affirmé jusqu’à ce qu’il soit évident, cela doit même être une habitude permanente de tout un chacun.

A l’heure où la « malbouffe » impacte la santé de notre population au plus haut point, où l’importation de denrées se complexifie, où la création de ressources propres et d’emploi locaux sont au cœur des sujets sociétaux, notre gouvernement proposera dès 2024 l’adoption d’un Plan de Transition Alimentaire décliné sur les 10 prochaines années.

Dès le plus jeune âge, l’apprentissage au gout des aliments locaux traditionnels dans les assiettes sera le fondement d’une société moins addictive aux sucres, aux conservateurs et autres additifs alimentaires issus de l’industrie chimique que nous retrouvons dans les produits manufacturés importés ; Et je sais de quoi je parle en tant que chimiste !

Nous devons gagner ce pari de l’accessibilité des produits locaux pour les consommateurs. En volume, en régularité, en termes de prix pour permettre aux familles d’acheter des produits frais locaux plutôt que des boites de conserves importées.

 

La question du prix est également primordiale. Nous devons tous, ensemble à nos niveaux, faire des efforts pour que nos fruits et légumes soient accessibles au plus grand nombre.

Le Pays a ouvert énormément de part de marché, notamment via les cantines scolaires, grâce aux communes.

Le gouvernement réduira les importations de produits frais dès que nous aurons remis en route notre machine de production agricole.

Je n’ai qu’un vœu à formuler aujourd’hui : ‘A Tanu !

Cela passe par des réseaux de distributions en circuits courts.

Plantez ensemble ! Faites-vous confiance !

Regroupez-vous pour être plus fort dans la relation commerciale face aux distributeurs !

Soyez partenaires avec nos services bâtisseurs, que sont la DAG, la DRM

et la CAPL qui sont là pour vous aider à mieux réussir dans votre métier.

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Notre foire agricole est un événement de promotion des produits locaux, du terroir, des fruits et légumes locaux aux qualités nutritives exceptionnelles, nos fleurs, nos miels et nos produits transformés sont chaque année mis en avant avec des procédés de transformation toujours plus innovants…

La foire agricole, c’est un moment de partage, et de rencontres pour les familles et les écoles.

Ces rencontres permettent également d’honorer des femmes et des hommes qui portent fièrement le développement du secteur primaire.

Aussi, mes chers amis, je voudrais adresser mes remerciements à vous tous, les professionnels du monde de la terre et de la mer, de nous nourrir au quotidien et de vous engager à faire que notre Pays puisse être autosuffisant alimentairement dans les prochaines années.

Je vous souhaite ainsi qu’à vos équipes, vos familles, une bonne foire et que ces 10 jours d’exposition rencontrent un franc succès !

Je tiens à remercier le Président de la chambre de l’agriculture et de la pêche lagonaire, Tavana Thomas MOUTAME, vos vice-présidents engagés, ainsi que l’ensemble des élus de l’assemblée générale et tous les agents pour porter fièrement ce bel évènement et avoir relevé tous les défis rencontrés pour ouvrir notre 37ème foire agricole. Soyez-en tous sincèrement remerciés pour le travail effectué !

Je remercie également les agents des services du Pays de la DAG, la DRM, l’EVT, nos Lycées agricoles publics et privés, pour leur participation active à cette fête du secteur primaire.

Vive la foire agricole de notre Fenua !   Mangez local ! et surtout cher public allez dépenser un peu vos sous !

Mauruuru, mauruuru maitai.

Discours du ministre de l’Agriculture