ALLOCUTION DE MONSIEUR EDOUARD FRITCH
PRESIDENT DE LA POLYNESIE FRANCAISE
ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES
4ème COMMISSION
9 OCTOBRE 2018
Monsieur le président,
En octobre 2016, je m’adressai à votre honorable assemblée pour la première fois. Aujourd’hui, c’est ma troisième intervention.
Président d’un pays doté d’une large autonomie institutionnelle, pays membre du Forum du Pacifique, je ne cesserai de démontrer que mon pays ne vit nullement une situation coloniale, ni une situation d’oppression, ni une situation de confiscation de nos richesses naturelles par l’Etat français.
J’affirme à nouveau que mon pays, la Polynésie française, est un pays autonome qui se gouverne librement et démocratiquement. Et ceci est écrit dans l’article premier de notre statut d’Autonomie. C’est un fait vérifiable et incontestable.
Si les sombres propos des indépendantistes polynésiens que vous entendrez plus tard, qualifiant la Polynésie de pays colonisé, avaient un début de vérité, je suis persuadé qu’avec tous les réseaux sociaux, vous l’auriez su et le monde entier avec.
Vous savez, je suis sincèrement désireux que votre assemblée soit pleinement informée sur la vérité et la réalité des faits et non sur une interprétation idéologique des faits historiques et politiques de mon pays.
Vous manquez d’informations objectives sur les réalités de mon pays.
Chaque année, je pourrai vous développer tous les arguments. Vous douterez toujours de mes propos car vous n’avez aucun moyen d’apprécier la crédibilité et la pertinence de mes affirmations.
Aussi, je vous invite à vous rendre en Polynésie pour constater par vous-même toute la réalité de mes déclarations.
Cette proposition témoigne de ma volonté d’être transparent et honnête avec votre assemblée.
J’aurai ainsi la garantie d’impartialité qui doit fonder le sérieux et le caractère incontestable de mes propos.
En cohérence avec cette exigence d’honnêteté intellectuelle, je réfute vivement le rapport qui vous a été soumis et qui prétend être « une évaluation indépendante du niveau d’autonomie du territoire présentée à la Quatrième Commission le 4 octobre 2016 » et mentionné au point 4 du projet de résolution.
Je le réfute parce que l’auteur, de nationalité américaine, était un salarié du groupe indépendantiste polynésien, et nous en avons les preuves. En outre, pour établir son rapport, l’auteur de l’étude n’a jamais rencontré ou entendu les différentes autorités institutionnelles de la Polynésie française, moi y compris. Pour toutes ces raisons, son rapport ne peut pas être qualifié d’évaluation indépendante.
Je demande solennellement à la 4ème Commission, que ce rapport ne soit plus mentionné dans les contributions servant à éclairer honnêtement votre assemblée.
Vous comprenez pourquoi il est pertinent de venir sur place, et de constater par vous-même la situation politique, économique et sociale de notre pays dans un souci d’impartialité et de neutralité intellectuelles.
J’ai bon espoir que ma proposition soit entendue par votre honorable assemblée et qu’elle fasse progresser positivement le débat sur la « Question de la Polynésie française ».
Par ailleurs, un évènement politique très important s’est produit au cours du premier semestre de cette année.
En mai 2018, la Polynésie française a tenu ses élections générales, fixées tous les 5 ans. A cette occasion, le Forum des Iles du Pacifique a envoyé une délégation de 4 observateurs qui ont fait le constat que le processus électoral ne souffre d’aucune remarque et réserve.
Les résultats de ces élections étaient clairs. La liste autonomiste que j’ai menée a gagné avec 49,2 % des suffrages. Je suis à la tête d’une majorité qui compte 39 Représentants sur une assemblée totalisant 57 élus. J’ai un nouveau mandat de 5 ans.
Lorsque votre assemblée a adopté l’inscription de la Polynésie, le 17 mai 2013, le parti indépendantiste polynésien représentait alors 29,3 % des électeurs.
En mai 2018, lors des dernières élections générales, ce même parti indépendantiste a recueilli 23,1 % des électeurs, soit une baisse de plus de 6 points depuis l’inscription.
Certes, ces élections n’ont pas valeur de scrutin d’autodétermination. Mais, elles donnent une très bonne indication sur l’état de l’opinion polynésienne à l’égard de la ligne autonomiste que je représente et en conséquence à l’égard de la ligne indépendantiste.
Il est utile que vous sachiez que le parti indépendantiste a fait campagne, sur les thèmes de la réinscription de la Polynésie française et sur le nucléaire. Ce parti se sert abondamment du drapeau et du nom de l’ONU pour atteindre son objectif de souveraineté.
Mais, nous sommes tous unanimes pour dire que seul le suffrage librement exprimé par le peuple polynésien pourra nous conduire et nous faire accéder à la souveraineté.
Il est un fait que le score électoral du Tavini en mai 2018 montre que l’adhésion de la population polynésienne à la ligne politique du parti indépendantiste faiblit.
En mai 2018, le peuple polynésien a réaffirmé son choix et son droit à rester un pays autonome au sein de la République française.
Parce que l’Etat français est notre partenaire indispensable pour un développement harmonieux de notre pays, les Polynésiens ont fait lucidement le choix de demander à l’Etat français de continuer à assurer sa sécurité et sa protection, notamment de sa ZEE de 5,5 millions de km2 contre le pillage de notre zone.
A notre demande, l’Etat français assure 90 % du financement de notre système éducatif, soit 600 millions de dollars US par an. Il paie nos enseignants du secteur public et de l’enseignement confessionnel privé protestant, catholique et adventiste, du niveau primaire à l’université.
A notre demande, l’Etat français a mis en place le seul tribunal foncier de toute la République française pour solutionner les gros problèmes d’indivision foncière de notre pays, condition nécessaire du développement de notre agriculture.
Ainsi, sur beaucoup d’autres sujets, qu’il serait trop long d’énumérer, la Polynésie française sollicite l’assistance financière et technique de l’Etat français. En tant que pays autonome au sein de la République française, nous nous tournons en priorité vers le partenariat et la coopération avec l’Etat français.
Nous reconnaissons que l’Etat français est un bon et loyal partenaire.
Mesdames et messieurs les ambassadeurs, plus que ces paroles, je vous invite à visiter notre pays et à vous rendre compte par vous-mêmes de la qualité de la coopération entre l’Etat français et la Polynésie.