Jeudi 17 janvier 2019
Vœux à la presse
Allocution du Président Edouard Fritch
Mesdames et messieurs les dirigeants de médias,
Mesdames et messieurs les responsables de rédactions,
Mesdames et messieurs les journalistes,
Chers amis,
J’ai toujours plaisir, ainsi que les ministres qui m’entourent, à vous recevoir pour cette traditionnelle réception consacrée aux vœux à la presse.
C’est une occasion finalement de nous retrouver de manière plus informelle et conviviale que dans le cadre des conférences de presse ou autres rendez-vous médiatiques.
L’année qui vient de s’écouler a surtout été marquée par les élections territoriales, que vous avez suivies de très près, et l’ouverture d’une nouvelle mandature.
Les Polynésiens, dans leur majorité, ont souhaité que nous poursuivions le travail engagé et qui chaque jour porte un peu plus ses fruits. Vous traitez d’ailleurs régulièrement les résultats des enquêtes de conjoncture qui attestent de la croissance du Pays.
On nous reproche parfois de ne pas aller assez vite dans la réalisation de nos projets, de ne pas communiquer suffisamment. J’ai l’habitude de le dire, notre style de gouvernance, ce n’est pas l’esbroufe, c’est l’efficacité et le résultat. C’est avant tout l’accompagnement des entreprises et des porteurs de projets qui sont les seuls à créer de l’emploi, avec, c’est vrai aussi, les marchés publics. C’est cette humilité qui, je le pense, a convaincu les Polynésiens qu’ils pouvaient continuer avec nous.
Depuis le début de la semaine, le gouvernement a présenté ses vœux à l’administration, aux organisations professionnelles et syndicales, au CESC.
Chaque fois, dans mon discours, j’ai souhaité mettre en avant les réformes qui doivent être menées à bien et qui seront au cœur de nos travaux de 2019.
Pour n’en citer que quelques-unes, je parlerai de la modernisation de notre administration qui doit être au plus proche du service des administrés, la poursuite de la réforme de la PSG avec notamment le volet assurance-maladie et la mise en œuvre de la branche unique, la réforme du code du travail dans le but de faciliter l’emploi, l’adaptation des formations aux réalités du marché du travail.
Vous le savez aussi, puisque c’était un axe majeur de notre campagne électorale, notre priorité portera également sur l’urgence sociale, l’aide aux plus démunis, aux familles fragilisées, aux exclus du système.
Vous avez déjà relevé à partir des discours que j’ai tenu devant l’assemblée en fin d’année dernière les actions qui seront entreprises sous la direction de la ministre des solidarités. Je ne reviendrai pas sur ce programme, dont j’ai largement parlé devant les partenaires sociaux, mais je puis vous assurer que 2019 sera bien mise à profit pour mettre en place les structures et moyens nécessaires à la cohésion de notre société.
Il y a un autre sujet que vous avez déjà évoqué et sur lequel nous travaillons en concertation depuis le début de l’année, c’est celui de la lutte contre les addictions, et plus particulièrement la consommation excessive d’alcool.
Cette consommation excessive est un véritable fléau pour notre société tant elle engendre de drames sur la route ou au sein des familles. Vous en êtes les observateurs privilégiés quand vous couvrez notamment les audiences au tribunal. Nous avons dépassé les limites de l’acceptable. A cet égard, croyez bien que je suis malheureux pour les victimes de ces comportements indignes pour notre culture.
Mais je suis encore plus préoccupé quand je constate, au travers des résultats des enquêtes qui ont été menées, que l’on s’adonne à l’alcool de plus en plus jeune et avec des alcools toujours plus forts.
Nous ne pouvons pas rester sans rien faire face à ce fléau. Nous avons déjà renforcé notre réglementation pour réprimer l’ivresse publique et la fabrication de komo puaka, nous préparons de vastes campagnes de sensibilisation pour lesquelles vos médias seront sollicités. Mais nous savons aussi que ce ne sera pas suffisant. Il faut agir directement sur la vente d’alcool.
Le gouvernement a présenté des propositions de restriction devant les maires, les confessions religieuses, les professionnels de la distribution. Chacun a fait ses propositions en retour. Le débat reste ouvert, mais nous avons le devoir d’agir rapidement et fortement.
Nous le ferons pour préserver nos jeunes et nos familles, même si comme j’ai pu le lire, l’ensemble de la société peut être pénalisée en raison des comportements déviants de certains. Mais je sais aussi que ceux qui ont une consommation raisonnée d’alcool pourront comprendre l’urgence à agir.
Derrière ces chantiers que je viens d’évoquer, c’est plus globalement la cohésion et la modernisation de notre société qui se fait jour.
2019 sera aussi chargée en grands rendez-vous.
Ainsi, le mois prochain, nous accueillerons la réunion de l’OCTA, l’association des pays et territoires d’outre-mer qui va rassembler les chefs des 25 collectivités associées à l’Europe. Ce sera l’occasion de nous poser la question de nos relations contractuelles avec l’Europe et avec ses représentations installées dans le Pacifique et à Bruxelles.
En 2019, nous attendons aussi la visite de plusieurs ministres du gouvernement national, en particulier ceux avec qui nous travaillons sous convention.
2019 verra également la visite du Président de la République, sans doute au deuxième semestre. Ce sera un moment important pour nous de dévoiler nos projets structurants, en vue d’un soutien et d’un partenariat plus importants entre la Polynésie et l’Etat.
2019 sera à la fois, l’année des récifs coralliens, composante essentielle de notre biodiversité, et l’année de la COP 25, évènement qui se tiendra au Chili.
C’est aussi l’année de l’élection au Parlement européen. Je suis conscient que c’est une élection peu mobilisatrice, mais nous ferons en sorte que les Polynésiens soient sensibilisés aux actions de l’Europe dans notre Pays.
2019, sera l’année des Jeux du Pacifique, moment important pour notre élite et notre jeunesse sportive qui se prépare d’ores et déjà à participer dignement à cette grande compétition régionale.
Sur le plan culturel, je note que 2019 sera une année exceptionnelle, avec en avril le festival des arts des Australes, en juillet le festival de Raromatai et en décembre le très attendu 12ème festival des arts des Marquises à Ua Pou, en sus de nos traditionnels rendez-vous des différents Heiva.
Vous aurez donc matière à écrire et commenter.
Nous ne serons pas, par contre, directement associés au grand débat national initié par le Président Macron. Les thématiques retenues pour ce débat relèvent pour la plupart de la compétence de la Polynésie, comme la fiscalité, le service public ou la transition énergétique.
Le débat, la formulation des attentes des Polynésiens, nous l’avons déjà fait lors des Assises de l’Outre-mer. C’est en quelque sorte notre cahier de doléances et le gouvernement central, avec notre collaboration, est appelé à mettre en œuvre les propositions qui ont été retenues.
Bien sûr, chacun pourra participer à ce grand débat puisqu’il y a un site internet dédié pour recueillir les contributions.
Pour ce qui nous concerne, notre priorité reste d’être à l’écoute de nos concitoyens. C’est aussi la raison des tournées gouvernementales comme celle que nous venons d’effectuer aux Australes.
Nous nous devons d’être au plus proche des réalités et des difficultés du quotidien dans certaines îles que certains d’entre vous ont pu jauger lors de notre visite à Hereheretue l’année dernière ou la semaine dernière à Rapa.
Nous sommes aujourd’hui préservés des conflits sociaux, mais nous devons rester attentifs.
C’est sans doute parce qu’il n’y a pas ici le même rejet des partis politiques qui marque la France et bien d’autres pays d’Europe, ce « dégagisme » ambiant ; c’est aussi le fait que nous avons toujours le dialogue avec ce qu’il est convenu d’appeler les corps intermédiaires : les maires, les organisations professionnelles, les églises, et même vous, les journalistes.
Les derniers développements du mouvement des gilets jaunes m’amènent aussi à partager une réflexion avec vous sur le poids des réseaux sociaux dans nos sociétés et sur les dérives que l’on peut y constater.
Quand vous voyez que vos confrères sont obligés de se déplacer dans les villes françaises avec des gardes du corps, qu’ils se font molester et insulter, il y a un réel danger démocratique.
A l’heure du « Facebook live », il faut, je pense, garder de la prudence. Facebook est ici chez nous le premier média, et vous y êtes tous présents aujourd’hui. Mais c’est aussi un média avec le travers des « fakenews » et des informations non-sourcées, où tout un chacun peut être cru par d’autres internautes en racontant n’importe quoi.
Bien sûr, vous n’êtes pas à l’origine de ces travers, mais il me semble indispensable, plus que jamais, de prendre le recul journalistique nécessaire pour traiter l’information. La course à l’immédiateté peut se révéler contre-productive en matière d’information éclairée du public.
Voilà, c’était juste une réflexion que je souhaitais partager avec vous, mais qui a trait à la mutation de notre société dont je vous parlais dans la première partie de mon discours.
Oui, nous voulons évoluer, nous voulons vivre dans une société moderne et ouverte au monde, mais préservons-nous de toutes les dérives auxquelles nous pouvons faire face avec un peu de recul.
Je voulais vous annoncer aussi que dans ce contexte de numérisation de l’information, nous souhaitons encourager la diffusion de la presse écrite dans l’ensemble des archipels. Le gouvernement proposera donc, à l’instar de ce qui existe en métropole, un dispositif de prise en charge du fret vers les îles afin que les journaux soient vendus au même prix à Tahiti que dans les îles. C’est un des éléments de la continuité territoriale qui pourra favoriser la diffusion de la presse et la lecture.
Pour finir, je vous souhaite, à vous, à vos collaborateurs et à vos proches, une bonne et heureuse année 2019 et je vous invite à partager le verre de l’amitié.