Mesdames, messieurs,

 

À la suite de l’annonce faite par le Premier Ministre, le vendredi 29 janvier dernier, la Polynésie sera amenée à fermer ses frontières à partir de ce mercredi 3 février. Cette mesure est prise pour protéger la Polynésie française contre l’introduction des virus variants.

Contrairement à la situation du mois de mars dernier, le Pays ne sera pas confiné.

Ceci signifie concrètement que nous continuerons à vivre sans contrainte, que nous pourrons circuler et voyager librement dans nos iles.

De même, la plus grande partie de nos activités ne sera pas interrompue.

Cette décision nationale de fermeture des frontières est motivée par une obligation de prévention sanitaire face à la menace des COVID variants qui affectent progressivement et massivement notre planète.

Nous devons donc fermer nos frontières pour empêcher les COVID variants d’entrer et de se propager en Polynésie française.

A ce jour, la durée de la fermeture des frontières n’est pas encore définie. Elle dépendra de l’évolution de l’épidémie dans le monde mais aussi de l’amélioration de la situation sanitaire de notre pays notamment dans les capacités du CHPF à traiter une forte variation des personnes en situation de réanimation.

Cette fermeture ne saurait cependant dépasser trois mois. Au-delà, ce ne seront pas les COVID mutants qui nous tueront, mais la crise économique, le chômage et les faillites. Aussi, le gouvernement de Polynésie demandera que cette fermeture dure au maximum 2 mois.

Dans l’immédiat, la Polynésie française ne pourra accueillir aucun touriste quelle que soit sa nationalité, qu’il soit notamment français ou européen ou américain.

Les conséquences immédiates de la fermeture de nos frontières affectent directement nos entreprises et nos familles.

Et parmi nos entreprises, nos grands hôtels internationaux, notre petite hôtellerie familiale et nos compagnies aériennes seront touchées durement. C’est une évidence.

Par voie de conséquence, les nombreux prestataires d’activités touristiques, les transporteurs touristiques, les artisans, les commerces, les entreprises agroalimentaires, etc…. qui seront également impactés.

Nous subirons à nouveau une chute de notre PIB pouvant fragiliser, voire mettre en péril, des pans entiers de l’économie polynésienne.

Aussi, depuis l’annonce faite par le Premier Ministre de la fermeture des frontières, le gouvernement de Polynésie a rencontré les partenaires sociaux, les banques, les hôteliers, Air Tahiti Nui et Air Tahiti.

En outre, par souci d’anticipation, le gouvernement s’est immédiatement mis en séminaire dès vendredi dernier, pour d’une part, comprendre les perturbations entraînées sur le fonctionnement des entreprises, évaluer leurs conséquences financières, les menaces sur l’emploi et les familles et, d’autre part proposer les mesures appropriées pour préserver l’emploi, les outils de travail et les familles sans ressources.

 

Chers amis, nous ferons tout pour sauver notre pays. Nous réussirons à relever notre Pays, tous ensemble.

Vous savez, j’ai une grande confiance envers les Polynésiens. Je suis fier de mon peuple. Cela fait près d’une année que nous luttons ensemble pour affronter cette épidémie. Cela fait près d’une année que les Polynésiens ont fait preuve de courage, de discipline, de patience. Je sais que le peuple polynésien possède en lui un instinct naturel de survie, de résistance et donc de résilience, héritage du Mana et des voyages de la Pirogue.

***

Comment allons-nous nous battre ?

Nous allons nous battre sur les plans sanitaire, économique et social.

I – Sur plan sanitaire

Nous profiterons de cette période de fermeture de nos frontières pour, d’une part mieux nous protéger et d’autre part, freiner davantage la propagation du virus. Pour cela :

1/ Nous intensifierons la vaccination ;

2/ Nous renforcerons le dépistage des cas positifs et des cas contacts ;

Aujourd’hui, nous avons les moyens de détecter les virus variants et nous fiabilisons ces moyens de détection.

3/ Nous consolidons et préparons les moyens supplémentaires de soin d’urgence et de réanimation ;

4/ Au cas où, il y aurait quelques voyageurs relevant d’un motif impérieux, nous exigeons un protocole sanitaire basé sur une quatorzaine avec :

  • Un test RT PCR trois jours avant embarquement ;
  • Une quatorzaine en isolement strict en site dédié à Tahiti et aux frais des passagers ;
  • Un test après 12 jours d’isolement avant la sortie au 14ème jour, avec un résultat négatif.

 

II – Sur le plan économique et social

La Polynésie se retrouve dans la même configuration qu’il y a un an, à savoir mettre en place les éléments qui concourront à minimiser les effets voire à minima au maintien de la situation actuelle en terme économique. Nous sommes une fois de plus confrontés à des temporalités différentes : considérer l’urgence avec des actions de sauvegarde à très court terme et des actions de redressement à moyen terme.

L’idée-force qui guide l’ensemble de nos propositions pour les mois à venir, est de libérer les activités internes à la Polynésie et d’assouplir certaines contraintes existantes.

Pour y répondre, le gouvernement a largement exploré les pistes permettant d’y faire face, avec les objectifs affichés :

– de maintenir les emplois

– d’inciter à la consommation interne

– d’éviter la crise sociale

En premier lieu, il est rappelé que le budget primitif 2021 qui a été voté en décembre dernier, permet à ce stade de répondre à l’urgence en terme financier.

Néanmoins, afin de permettre à nouveau, la réactivité qui s’impose, il convient de scinder les urgences en trois parties :

  • Le législatif : il s’agit de modifier certains textes nécessaires au soutien des ménages et des entreprises, notamment sur les aides à l’emploi et au maintien de l’activité ;
  • Les mesures de sauvegarde des emplois : il s’agit de limiter les licenciements économiques ;
  • Les mesures économiques, fiscales et sociales : il s’agit de lister des mesures de soutien aux entreprises et aux familles.

 

Sur la partie législative, il est prévu de présenter à l’Assemblée de Polynésie française que je viens de convoquer en séance extraordinaire :

1/ Une modification de la Loi du Pays sur les aides exceptionnelles à l’emploi qui sera présentée en Conseil des Ministres, dès demain. Elle vise à renforcer notre plan de sauvegarde des emplois.

2/ Une modification de la Loi du Pays sur l’emprunt COVID. Le projet de Loi sera présenté en Conseil des Ministres, courant février. Il permettra d’ouvrir la possibilité d’un second prêt auprès de l’Etat.

3/ Nous aurons nécessairement des dépenses imprévues. Un nouvel arrêté sera utile pour les prendre en compte dans notre budget. La présentation en Conseil des Ministres se fera dans le courant de ce mois de février.

4/ Nous présenterons en urgence une nouvelle Loi du Pays sur la lutte contre le gaspillage alimentaire. Certains de nos produits, notamment certaines conserves et certains produits secs, peuvent encore être propres à la consommation. Pour éviter le gaspillage alimentaire, nous permettrons aux associations caritatives de les obtenir en toute légalité et transparence. Ce projet de Loi sera présenté en Conseil des Ministres dans le courant de ce mois de février.

5/ Enfin pour alléger les charges de certaines entreprises, nous agirons également sur la Loi du Pays portant sur l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés pour les entreprises de 25 salariés et plus. Le taux d’obligation était défini à 2 % des effectifs de l’entreprise jusqu’au 31 décembre 2020. Il s’agira de prolonger le maintien de cette obligation à 2% pour cette année 2021, au lieu des 4% prévus depuis le 1er Janvier.

 

Sur la partie des emplois

1/ Nous proposons la mise en place d’un DIESE amélioré avec :

  • Un rehaussement du plafond à 2 SMIG ;
  • Les plafonds d’intervention du Pays rehaussés ;
  • Des réductions de temps de travail pouvant aller jusqu’à 100% ;
  • Une prise en charge des cotisations sociales de la partie aidée par le Pays.

Le coût de cette opération est de 6 milliards FCP.

2/ Nous proposons de réactiver l’Indemnité Exceptionnelle :

Après une année 2020 difficile, cette nouvelle crise risque d’entraîner des licenciements économiques. Cette intervention du Pays permettra de verser une indemnité aux salariés licenciés économiques sur une période de 3 mois, renouvelable une fois. Ainsi, par exemple :

  • Pour un salarié dont le salaire est inférieur à un SMIG, l’indemnité sera de 65 % du salaire soit un plafond allant jusqu’à 100 000 FCP ;
  • Pour un salarié dont le salaire est entre 1,5 et 2 SMIG, l’indemnité sera de 55 % du salaire, soit un plafond allant jusqu’à 170 000 FCP ;
  • Pour un salarié dont le salaire est entre 3 et 4 SMIG, l’indemnité sera de 45 % du salaire, soit un plafond allant jusqu’à 275 000 FCP ;
  • Pour un salarié dont le salaire est supérieur à 4 SMIG, l’indemnité sera de 40 % du salaire, avec un plafond allant jusqu’à 300 000 FCP ;

Le surcoût de cette Indemnité Exceptionnelle améliorée est de 1,3 milliard de FCP.

3/ Nous améliorons la mesure du DESETI :

Nous proposons de compenser la perte de revenus des travailleurs indépendants contraints, soit à une cessation partielle, soit à l’arrêt de leurs activités.

Pour une cessation partielle, l’indemnité mensuelle sera de 60 000 FCP.

Pour un arrêt total des activités, la compensation sera relevée à 100 000 FCP, au lieu de 70 000 FCP précédemment.

Le surcoût de ce DESETI amélioré est de 650 millions de FCP.

4/ Nous proposons la réactivation des CAES :

Ce dispositif de solidarité permet de verser au bénéficiaire ne disposant d’aucun revenu au sein du foyer une aide financière forfaitaire mensuelle sur une durée de 3 mois, en contrepartie de sa participation à des travaux d’intérêt général.

Nous proposons une amélioration de ce dispositif en portant le bénéfice à 3 mois, renouvelable une fois.

De plus, pour éviter une confusion constatée avec le CAE, nous donnerons une nouvelle appellation à ce dispositif qui deviendra « Convention d’Insertion Sociale ».

Le surcoût de ce CIS est de 450 millions.

Bien entendu, je signale que les mesures déjà existantes sont maintenues.

Les nouvelles mesures annoncées seront en vigueur dès qu’elles seront votées à l’Assemblée ou pris par acte du Conseil des Ministres.

L’ensemble de ces mesures sera appliqué jusqu’au 30 Juin 2021. Elles nécessiteront d’adopter des collectifs budgétaires.

 

Sur la partie économique, fiscale et sociale 

Comme je l’ai évoqué tantôt, les mesures économiques proposées sont notamment destinées à relancer la consommation des ménages et à alléger les charges des entreprises. Parmi les mesures :

1/ Nous proposons une extension de la période des soldes en concertation avec la CCISM ;

2/ Nous proposons une exonération des pénalités liées au non-respect de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés au titre des années 2020 et 2021.

3/ Nous proposons une suspension des pénalités et des majorations de retard aux régimes des salariés et des non-salariés pour l’année 2021, pour les secteurs les plus touchés. Le Conseil d’Administration de la CPS, sera consulté le 8 février pour le RNS, et le 28 février pour le RGS ;

4/ Nous demanderons à notre administration fiscale un examen bienveillant, d’une part des demandes de prorogation des délais de recouvrement de l’impôt et, d’autre part des pénalités de retard sur le recouvrement de l’impôt. Les demandes seront formulées par les contribuables et examinées au cas par cas.

5/ Nous prolongeons d’une semaine le Salon du tourisme à distance jusqu’au 13 février 2021 au lieu du 7 février.

6/ La Ministre du tourisme étudie, à notre demande, un projet chèque-voyage dans les îles – Titeti Aia – sous la condition d’un hébergement en pension de famille.

7/ En lien avec cette mesure de chèque voyage, d’autres mesures sont à l’étude pour inciter nos résidents à faire du tourisme dans les îles.

8/ Notre Ministre de la Culture et des Sports prépare et ajuste les protocoles sanitaires en vue de la reprise prochaine des activités de salles de sports, des salles de spectacles, des salles d’activités artistiques, des rencontres sportives, des expositions et des expoventes. Ces mesures feront l’objet d’une annonce commune avec le Haut-Commissaire.

En outre, je puis vous annoncer que :

9/ En alternative du Heiva, nous proposons le « Festival Tahiti Tia Mai ». Ce sera un festival de chants et danses avec un couplage d’expositions de costumes traditionnels ;

10/ Nous préparons une commande de spectacles au profit de personnes en difficulté et placées en centre d’accueil d’une part, et une commande 10 concerts diffusés sur TNTV, en soutien à nos artistes, d’autre part ;

Pour répondre et pourvoir aux besoins essentiels des familles en difficulté :

11/ Nous multiplierons les paniers solidaires et les kits alimentaires en relation avec les commerçants et les producteurs agricoles. Le Pays s’associera avec les communes, la Croix rouge et le Contrat de ville

12/ Nous prolongerons les allocations familiales à 15 000 FCP pour les ressortissants du RSPF, jusqu’au mois de juin 2021.

Enfin, pour garantir l’efficience de nos mesures, l’une des conditions sine qua non est l’assouplissement des mesures du couvre-feu prises au mois de Décembre dernier. Cette proposition a été soumise à la réflexion du Haut-Commissaire. Elle fera l’objet d’une communication dans les jours à venir.

***

Chères Polynésiennes et chers polynésiens, face à cette nouvelle vague de la pandémie, nous devons une fois de plus, prendre nos responsabilités. Nous devons nous protéger pour sauver la vie de celles et ceux qui sont les plus fragiles.

Il est essentiel à mes yeux, et je sais que vous partagerez tous cette volonté, de renforcer notre solidarité envers les salariés, les petits artisans et les plus fragiles d’entre nous.

Nous devons aussi soutenir sans faiblir les entreprises qui sont impactées par la crise dans les domaines du tourisme et de leurs nombreux sous-traitants, notamment ceux des transports et des loisirs.

Enfin, avec l’Etat, il nous appartient de trouver des dispositifs financiers exceptionnels pour soutenir nos fers de lance du transport aérien et du tourisme. Nous les trouverons.

Sous mon impulsion, soyez assurés que le Gouvernement ne ménagera pas ses efforts pour vous accompagner pendant ces temps difficiles.

Mais vous aussi, restez des acteurs actifs de la vie et de la reprise de notre économie, en étant soucieux de consommer et de voyager local et en étant à l’écoute de ceux qui sont dans la difficulté

Enfin, et je terminerai mon propos par une note d’optimisme, car nous avons la chance de vivre dans un Pays merveilleux et, après ces crises à répétitions, nous retrouverons nécessairement les voies d’un monde apaisé et espérons-le, d’un monde plus solidaire.

Nous vous remercions.