Au cours de son intervention précédent son élection, le Président de la Polynésie française a pu présenter la vision de son mandat. Il a d’abord tenu à remercier en langue tahitienne celles et ceux qui l’ont accompagné dans son combat politique, puis il a remercié chacun des autres candidats à la Présidence qui se sont succédé, en ayant une pensée particulière pour les victimes des inondations à Teahupo’o. Le Président n’a pas voulu lire un discours écrit, voici donc retranscrit en substance l’esprit de ses principales interventions.
« Je suis venu sans discours écrit car aujourd’hui je veux m’adresser au peuple polynésien. Je ne veux pas ressasser notre programme que tout le monde connait déjà et que nous avons eu l’occasion de présenter durant la campagne, je veux simplement retenir les trois piliers de ce programme qui traduisent l’esprit dans lequel je suis aujourd’hui : Fa’atura = respecter ; Fa’aora = soutenir ; Fa’atupu = bâtir.
Respecter le peuple avant tout et toutes les institutions, l’Etat pour qu’il nous respecte, nos cousins du pacifique et puis nous respecter nous-même, en mangeant mieux, en faisant plus de sports. Marcher permet de se changer les idées, de penser à autre chose.
Je prends parfois le temps de lire lorsque j’ai du mal à trouver le sommeil, et je voudrais citer Léon Tolstoï qui disait : « tout le monde veut voir le monde changer mais personne ne veut changer ». Nous devons méditer sur ces paroles tous autant que nous sommes : avant de réclamer que le monde change essayons de changer nous-même.
Aujourd’hui n’est pas le moment des promesses, mais celui de l’engagement, celui de vous servir et non pas de nous servir. Cet engagement est difficile et c’est un choix qui pèse sur la vie familiale, c’est un engagement que nous prenons avec conviction.
J’entends la défense vibrante de l’autonomie, je ne suis pas là pour l’attaquer ; l’autonomie c’est un statut, un cadre dans lequel nous évoluons aujourd’hui. Mon collègue député, Tematai Legayic, utilise une parabole pour parler de l’indépendance : « demain on nous dit s’il y a indépendance l’Etat va s’en aller et nous allons mourir de faim ! Est-ce à dire que l’Etat va partir avec les tarots, avec le umara, avec les poissons de nos lagons, avec les pieds et les mains des polynésiens ? »
J’entends les craintes exprimées par les Hakaiki (maires des Marquises) de nous livrer aux chinois. Ce n’est pas le cas, je peux vous l’assurer, en revanche nous voulons pouvoir discuter avec tout le monde, et nous voulons pouvoir décider par nous-mêmes.
La crainte que l’indépendance soit imposée n’est pas non plus réelle, nous sommes inscrits dans un processus à l’ONU, comme la Nouvelle Calédonie, dans un processus d’autodétermination et au final ce sont les Polynésiens qui choisiront et la France restera de toute façon un partenaire historique.
Je voudrais avant de conclure adresser mes derniers mots à notre jeunesse, je voudrais vous dire que vous êtes réellement l’avenir de ce pays, soyez fiers d’être polynésiens, sans cette fierté vous ne pouvez pas vous projeter dans l’avenir, vous devez avoir envie de bâtir ce pays, ensemble, à charge pour nous de construire les conditions pour que vous puissiez trouver votre voix, avec un système éducatif adapté, s’il veut être agriculteur et bien qu’il soit le meilleur agriculteur.
Il nous faut aussi préserver et faire fleurir nos langues, car sans elles nous ne sommes plus rien, il nous faut mettre en place à l’instar de ce qui se fait au pays basque ou en bretagne par exemple, sans qu’il soit besoin d’un statut d’autonomie, des écoles d’immersion, c’est la condition sine qua non pour que nos enfants soient réellement ce qu’ils sont sans exclusion des autres cultures, dans le respect des différences de chacun. »